La nouvelle n’aura probablement pas échappé aux acteurs du monde économique et institutionnel héraultais : il y a changement de présidence à la Chambre départementale des notaires de l’Hérault !
Maître Maguelonne Escande-Cambon cède en effet (après deux années à la tête de cette institution représentant les 344 notaires et 144 offices du département) la place à Maître Laurent Vialla, son confrère qui était, voilà il y a encore quelques semaines, son vice-président. Une transition dans la continuité, la bonne énergie et avec une sincère confraternité qui permet à ce dernier d’annoncer d’ores et déjà la couleur : il souhaite prolonger « et même amplifier » les actions entreprises par ses prédécesseurs. Au pluriel, les prédécesseurs. En cela, il ne fait pas exception à cet ancrage historique dans la profession et à cette habitude, qu’on pourrait peut-être même qualifier de déformation professionnelle : se détacher de l’instant pour raisonner à long terme quand il s’agit du futur, et en tirant toujours enseignement du passé. Mais heureusement, on ne refait pas complètement un homme. C’est ainsi en toute simplicité qu’il a accepté de répondre à nos questions.
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Interview
Maître Vialla, avant de rentrer dans le vif du sujet et de l’actualité, présentez-vous à nos lecteurs, s’il vous plaît. Je suis passionnément et fièrement notaire, tout aussi entièrement chef d’entreprise, puisque je suis associé dans une étude montpelliéraine comprenant 4 associés et 30 collaborateurs dont une notaire salariée. J’incarne, dans ma famille, la quatrième génération de notaires, puisque mon père et les deux générations avant lui exerçaient ce noble métier. C’est ainsi, « tout naturellement », oserai-je dire, que j’ai rejoint l’étude de mon père en tant qu’associé en 1999 avant de lui succéder en 2001. J’avais, avant cela, obtenu ma maîtrise de droit à l’université de Montpellier et choisi de me forger une solide expérience en sanctionnant un Diplôme Supérieur du Notariat, à l’Université de Paris II Panthéon Assas.
Parallèlement, au sein d’une importante étude parisienne où j’ai été collaborateur pendant sept ans, j’ai acquis une solide expérience dans le droit de la construction et le droit de la famille. J’y ai notamment appris à adapter le notariat traditionnel aux nouvelles exigences alors émergentes. Mais j’y reviendrai par la suite, si vous me le permettez. J’aimerais ainsi achever cette introduction en disant ma fierté d’être investi de cette casquette de président de la Chambre départementale des notaires de l’Hérault. C’est une maison que je connais bien pour l’avoir rejoint en qualité de membre de 2007 à 2009 et à nouveau en mai 2023, en qualité de vice-président. Entre-temps, j’avais rejoint (de juin 2019 à juin 2023) le Conseil Régional des notaires de la cour d’appel de Montpellier, dont vous interviewiez récemment le président, Maître Martin, que je salue au passage.
Vous n’êtes donc pas étranger au poids des responsabilités d’un mandat électif.
Non, effectivement. D’autant que traditionnellement à la Chambre départementale des notaires de l’Hérault, nous sommes élus pour trois ans, dont deux ans de présidence. En tant que vice-président, j’ai donc eu toute latitude pour observer la réalité du poste et mettre, avec Maître Escande-Cambon, les mains dans le cambouis.
Vous avez rapidement, à l’issue de votre élection du 30 mai dernier, indiqué « marcher dans ses pas ».
Oui, car même s’il nous arrive d’avoir des avis différents, nous avons la même ambition pour la profession et l’envie de la faire grandir. C’est donc « un changement dans la continuité », comme le dit la formule consacrée, mais en restant agile et en capacité de changer de cap en raison du caractère mouvant de l’actualité, bien sûr.
Quelle est donc votre feuille de route ?
Ma première ambition surplombe toutes les autres. Elle consiste à maintenir la cohésion au sein de la profession, notamment par rapport aux nouveaux outils et aux nouveautés réglementaires qui nous challengent parfois. Les notaires avaient, pour vous donner un exemple, une longueur d’avance sur tout ce qui concerne la dématérialisation des actes. Mais pas tous les notaires, pas toutes les études. Le Covid nous aura ainsi alerté sur l’importance de grandir ensemble au service d’une seule et même image. Sans renier bien sûr l’identité de chacun car chaque professionnel est différent. Jeune, moins jeune, spécialiste, généraliste, urbain ou rural, la beauté de ce métier réside aussi dans sa diversité. Mais pas d’angélisme pour autant : la profession avance groupée. C’est avec ce mot d’ordre que j’aimerais consacrer une part de mon mandat à cet autre objectif : accorder le notariat aux attentes nouvelles de nos concitoyens, à travers l’opportunité que représente l’arrivée de l’Intelligence Artificielle pour renforcer l’acte notarié. L’IA est un enjeu clé qui témoigne de l’utilité de notre profession dans un monde qui évolue en permanence et à toute vitesse.
L’IA, même pas peur.
Sourire. Non, pas peur du tout, même si je conçois que la nouveauté et les fantasmes qui s’y rajoutent traditionnellement, puissent en inquiéter certains. Attention, je n’ai pas dit que ce serait facile, je dis que bien intégrée dans nos pratiques, cela représente l’avenir, car cela permet d’économiser un temps précieux, mis à profit pour le conseil. Vous savez, nous notaires, réfléchissons toujours dans un temps long. Que représente l’IA aujourd’hui par rapport à ce qu’elle représentera demain ? Voudrons-nous, alors, rattraper en train qui roule déjà à vive allure ou plutôt faire partie de ceux qui sont déjà à bord ?
Sur un autre sujet, concevez-vous que la dématérialisation massive des actes détache certains de nos concitoyens de la réalité de ce métier, de la valeur de ses actes ?
La technologie a du bon, du moins bon. Et en effet, elle n’est pas encore parvenue à égaler, dans son aspect solennel, la prestance d’un rendez-vous physique. Se rassembler pour échanger, s’interroger réciproquement sur les points d’un document qui nous engage légalement, cela permet de bien mesurer l’importance de ce geste.
Cela me fait penser que j’ai oublié un point essentiel au moment de vous répondre, tout à l’heure, concernant mes ambitions en tant que président !
Lequel ?
Démontrer à tous notre utilité fondamentale au bon déroulement de la société dans son ensemble. Gardons en tête que notre travail garantit une forme de paix sociale dans un monde partisan où nous comptons parmi les derniers à dire aux gens ce qu’il faut dire, et pas ce qu’ils veulent entendre. Le droit continental exige en cela authenticité, équité, durée, ce qui explique d’ailleurs qu’il gagne du terrain malgré un modèle anglo-saxon jurisprudentiel plus visible et souvent plus attractif. En apparence…
« Notre travail garantit une forme de paix sociale dans un monde partisan où nous comptons parmi les derniers à dire aux gens ce qu’il faut dire, et pas ce qu’ils veulent entendre »
Le métier de notaire lui-même nourrit un certain imaginaire…
Je ne vous le fais pas dire. Et que dire de l’ambiguïté des frais de notaire quand on sait que la majeure partie de la collecte revient à l’État ? Employons le terme plus exact de « frais d’acte ». D’où l’importance, aussi, de rappeler notre qualité d’officier ministériel, investi d’une mission de service public : le notaire est le magistrat de l’amiable. Et qu’un acte notarié a valeur exécutoire et a pour but d’éviter le recours à un jugement. Par ailleurs, rappelons qu’un notaire se retrouve souvent dans sa volonté de défendre le droit la famille. L’empathie, l’écoute, font partie de nos valeurs cardinales. C’est pour cela que nous mettons toute la souplesse, la rigueur et l’exigence utiles au service de la population. Mon bon conseil, c’est d’ailleurs de dire à chacun de ne pas hésiter à frapper à notre porte. Pas seulement quand c’est obligatoire, mais dans une forme de spontanéité parce que pour beaucoup d’actes légaux, la finalité sera toujours le notaire. Je le dis : les notaires sont accessibles, le conseil n’engage pas forcément une facture à la clé, et les actes, qui sont eux payants, ne sont pas forcément toujours la solution. Pour autant, une réponse éclairée peut en apporter de bien nombreuses…
Un travail d’équipe
Pour mener à bien sa mission, Maître Laurent Vialla compte s’appuyer sur une équipe mixte de 21 membres exerçant sur l’ensemble du territoire du département.
Composition du bureau 2024-2025
Président : Me Laurent Vialla. Présidente honoraire : Me Maguelonne Escande-Cambon. Vice-présidente : Me Françoise Cadene, déléguée à la communication. Secrétaire : Me Laurent Delage. 1er Syndic : Me Philippe Pradal. Trésorière : Me Fabienne Goujon-Vansuyt. Rapporteur : Me Geoffrey Sanchez.
Membres de la Chambre des Notaires : Me Olivier Corona, Me Valéry Flandin, Me Catherine Glodas, Me Claire Vinas, Me Sophie Roussel, Me Alexandra Ribaud, Me Marie Besson-Blanchin, Me Jacques-Edouard Giraud, Me Sébastien Gonthier, Me Alexandra Martinez-Grenier, Me Pierre-François Clauzel, Me Jean-Marie Lestra, Me Margot Bertrand, Me Jeanne Caderas de Kerleau.
Un acte qui vous concerne, les droits de succession, a fait l’objet de nombreuses promesses, certaines passées inaperçues, d’autres devenues très audibles dans la cacophonie des débats actuels : je fais allusion aux droits de succession, que de nombreux Français considèrent comme une « confiscation injuste ». Quel est votre opinion là-dessus ?
En ma qualité de président de cette chambre, je ne m’autoriserai pas à exprimer une opinion personnelle… L’impôt n’est pas en lui-même injuste… Il y a un débat éternel sur les droits de succession. Sont-ils confiscatoires ou rétablissent-ils un équilibre ? La création de régimes spéciaux destinés à favoriser la transmission organisée du patrimoine (pacte Dutreil pour les entreprises, abattements spéciaux pour les transmissions d’entreprises agricoles, abattements légaux pour les donations…) permet d’alléger les droits successoraux. La réponse est dans l’équilibre et ce n’est pas simple de le faire comprendre, car je demeure convaincu que chacun de nous ambitionne de transmettre ce qu’il a créé, notamment quand il y a un attachement sentimental et familial !
Vous indiquez souvent à vos clients que la réponse n’est pas toujours fiscale.
Le sujet de la fiscalité est souvent mis sur la table, mais mon deuxième bon conseil du jour est celui-ci : n’écartez jamais la problématique familiale, pilier central de toute réflexion censée et, au risque de me répéter, de notre profession.
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Composition des Frais de Notaire
Lorsque l’on achète ou vend un bien immobilier en France, une partie souvent négligée mais significative du coût total est constituée des frais de notaire. Ces frais, censés couvrir les honoraires du notaire ainsi que les taxes et droits de mutation, peuvent représenter jusqu’à 8% à 10% du prix d’achat du bien.
Opacité et Complexité Tarifaire
Une grande partie de ces frais va aux différents impôts et taxes que l’acheteur doit payer à l’État, tels que les droits de mutation et la taxe de publicité foncière. Cependant, une part importante revient également aux honoraires du notaire lui-même. Ces honoraires, bien que réglementés par l’État, restent souvent élevés et peuvent sembler disproportionnés par rapport aux services réellement rendus.
Manque de Transparence et Inégalités Sociales
De nombreux citoyens se plaignent du manque de transparence et de la complexité des tarifs des notaires. Contrairement à d’autres professionnels, les notaires ne sont pas tenus de fournir un devis détaillé avant d’engager leurs services. Les clients se retrouvent souvent confrontés à des frais imprévus et à des pratiques tarifaires opaques, ce qui alimente un sentiment d’injustice et de méfiance envers la profession.
Impact sur l’Accessibilité au Logement
Les frais de notaire sont souvent critiqués pour leur impact sur l’accessibilité au logement. Dans un marché immobilier déjà tendu, ces frais peuvent constituer un obstacle financier majeur pour les acheteurs, en particulier les primo-accédants et les jeunes ménages. Cette situation renforce les inégalités sociales et territoriales en limitant l’accès à la propriété pour de nombreux citoyens.
Appel à une Réforme du Système
Certaines voix s’élèvent pour réclamer une réforme en profondeur du système des frais de notaire. Ces réformes pourraient inclure une meilleure régulation des tarifs, une plus grande transparence des pratiques tarifaires et une simplification des procédures pour réduire les coûts pour les consommateurs.
Conclusion : Vers une Plus Grande Équité
En conclusion, les frais de notaire sont souvent perçus comme une charge financière injuste pour les citoyens français. Le manque de transparence, les tarifs élevés et l’impact sur l’accessibilité au logement sont autant de raisons pour lesquelles une réforme du système est nécessaire afin de garantir une plus grande équité et un accès équitable à la propriété pour tous.