Des amendements au projet de budget pour 2025 visent à augmenter les droits de mutation à titre onéreux, surnommés «frais de notaire». Un projet inadmissible pour Henry Buzy-Cazaux, président-fondateur de l’Institut du management des services immobiliers.
© Pixabay – Comprise entre 8% et 8,50% de l’opération pour un logement existant, les droits de mutation doivent faire l’objet d’un autofinancement par l’acquéreur.
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Il fallait s’y attendre. En captant aux collectivités locales 5 milliards d’euros, sous forme de réduction des dotations auxquelles elles avaient droit jusqu’alors, l’État a fait courir aux ménages français un risque considérable : les exécutifs locaux allaient être tentés d’augmenter les taxes à leur main. On les sait prompts à ce geste, officiellement dicté par un impératif majeur. Les régions, les départements, les communes ont des obligations de service envers leurs administrés et des prérogatives à assumer. Ces collectivités doivent disposer des moyens nécessaires, où qu’elles les trouvent, fût-ce dans la poche du contribuable.
C’est ainsi que la suppression de la taxe d’habitation, malgré la promesse de compensation par l’État -péniblement mise en place deux ans plus tard-, a inéluctablement entraîné la hausse quasi généralisée sur le territoire de la taxe foncière, entretemps transférée aux communes. Qui plus est cette fois, le gouvernement a ouvert avec les élus locaux une polémique violente: au-delà de les associer à l’effort de réduction du déficit public au nom de la solidarité nationale, il leur a reproché d’avoir laissé dériver leurs charges de fonctionnement, leur masse salariale en particulier… L’État n’est pas le mieux placé pour émettre cette critique, du coup mal accueillie par des collectivités qui sont obligées par la loi de présenter des budgets équilibrés, sans déficit autorisé! Bref, les élus locaux sont à la fois un peu plus désargentés et agacés.
Les «frais de notaire», une charge déjà extrêmement lourde
Pour autant, on ne leur donnera pas l’absolution: beaucoup ont pris de mauvaises habitudes et vivent sur un trop grand pied. Justement, la perception de droits de mutation assis sur les transactions de logements, en croissance ininterrompue depuis quinze ans lorsque la pandémie est intervenue, a incité les collectivités locales à dépenser sans compter et à manquer de prudence. Elle se sont trouvées fort dépourvues quand la bise fut venue, pour parodier La Fontaine. La bise, c’est la chute des transactions, menant à une impasse de l’ordre de 25% des rentrées fiscales. Pour Paris, qui a statut de département, 300 millions ont manqué à l’appel en 2023… Une paille. Après des progressions de plusieurs dizaines de millions par an, la déconvenue est rude et quand la mairie avait tablé sur des rentrées finalement bien moindres, deux voies sont possibles : réduire les dépenses ou aller chercher ailleurs des recettes. Dans la capitale, entre 2013 et 2022, le produit des DMTO a doublé, passant de 918 millions à 1,746 milliard! L’essentiel des départements ont connu des hausses sur la période comprises entre 50% et 100%.
Dans ce contexte, voilà que ces collectivités veulent que le législateur les habilite à augmenter d’un demi-point leur part, la portant de 4,50 maximum à 5%, la part des communes, elle, s’établissant à 1,20%. Inadmissiible, pour plusieurs raisons. D’abord, les droits de mutation à titre onéreux, improprement appelés frais de notaire parce que le notaire les perçoit pour le compte de l’État -qui en a une très faible part- et des collectivités, départements et communes-, constituent déjà à ce jour une charge augmentative du prix d’achat extrêmement lourde : comprise entre 8% et 8,50% de l’opération pour un logement existant, elle doit faire l’objet d’un autofinancement par l’acquéreur, les banques ne l’incluant plus dans l’enveloppe de prêt. Pour un achat d’un montant moyen de 250 000€, ce sont quelque 20 000€ que le ménage doit avoir épargnés. Pour les primo-accédants, ce montant peut
simplement faire renoncer à l’achat. Une taxe ne doit pas compromettre une transaction sur laquelle elle est assise. Une hausse aurait pour effet, à ce niveau, de réduire le nombre de transactions, et par conséquent d’affaiblir les recettes potentielles des collectivités.
La France détient le record de cherté des droits de mutation
Il faut aussi mentionner que la France détient le triste record de la cherté des droits de mutation. La commission européenne nous observe et analyse notre capacité à assainir nos finances publiques. Les marchés eux-mêmes nous scrutent. S’ils constatent que nous misons sur des hausses fiscales insupportables, ils mesureront que nous étouffons la croissance et que les augmentations de taux annoncent en fait des baisses de produits. Notre projet économique perdra tout crédit. Il est loin le temps où l’on pouvait se dire cyniquement que 0,5% de plus de DMTO ne changerait rien, et que les ménages paieraient sans sourciller. Il n’y a plus d’argent facile pour les classes moyennes et en outre, les prix ont tellement cru depuis quinze ans que toute hausse en pourcentage correspond
à des factures en valeur absolue indécentes.
Autre raison de refuser une hausse de ces droits: aux termes de la Constitution, ces produits fiscaux ne sont pas affectés. En clair, pas d’obligation pour les départements et les communes de flécher cette manne vers la politique du logement. Cette disposition dégrade l’acceptabilité de toute augmentation, au point qu’à Paris, depuis quelques années, la maire a soin d’expliquer qu’elle s’attache à redistribuer le fruit des DMTO à l’habitat, pour favoriser le logement social notamment. Ce n’est pas le cas partout… Enfin, l’argument selon lequel les prix pourraient baisser à due proportion d’une hausse de DMTO ne tient pas: les vendeurs auront tendance, à tort sans doute, à considérer que c’est une donnée exogène, qui n’est pas à proprement parler attachée à l’acquéreur. Ils ne l’intègreront pas dans le calcul de leur prix de cession ni dans la négociation.
Les Français jugeraient «honteuse» une hausse des frais de notaire
La ministre du logement et de la rénovation urbaine, ancienne sénatrice et vice-présidente de la Chambre haute avant d’être élue députée et nommée ministre, n’est pas insensible aux difficultés des collectivités locales, que le Sénat a vocation à représenter. Elle est également aujourd’hui attentive à resolvabiliser les ménages et une telle décision viendrait altérer le mouvement à l’œuvre grâce à une atténuation des taux d’intérêt, après la poussée d’inflation. Il y a fort à parier en outre que les ménages, qui élisent les conseillers départementaux au suffrage universel direct, sanctionneraient les élus qui -si le législateur les y autorisait- se mettraient au taux maximum de DMTO.
Les responsables politiques ne doivent pas oublier que des mesures fiscales rejetées de l’opinion peuvent la mener à tous les dérèglements. Les Français considèreraient à bon droit qu’une hausse des «frais de notaire» comme honteuse. Les notaires eux-mêmes, percepteurs, y sont défavorables, peu disposés à présenter aux acquéreurs lors d’une vente une facture encore grevée. Tant va la cruche à l’eau…
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Composition des Frais de Notaire
Lorsque l’on achète ou vend un bien immobilier en France, une partie souvent négligée mais significative du coût total est constituée des frais de notaire. Ces frais, censés couvrir les honoraires du notaire ainsi que les taxes et droits de mutation, peuvent représenter jusqu’à 8% à 10% du prix d’achat du bien.
Opacité et Complexité Tarifaire
Une grande partie de ces frais va aux différents impôts et taxes que l’acheteur doit payer à l’État, tels que les droits de mutation et la taxe de publicité foncière. Cependant, une part importante revient également aux honoraires du notaire lui-même. Ces honoraires, bien que réglementés par l’État, restent souvent élevés et peuvent sembler disproportionnés par rapport aux services réellement rendus.
Manque de Transparence et Inégalités Sociales
De nombreux citoyens se plaignent du manque de transparence et de la complexité des tarifs des notaires. Contrairement à d’autres professionnels, les notaires ne sont pas tenus de fournir un devis détaillé avant d’engager leurs services. Les clients se retrouvent souvent confrontés à des frais imprévus et à des pratiques tarifaires opaques, ce qui alimente un sentiment d’injustice et de méfiance envers la profession.
Impact sur l’Accessibilité au Logement
Les frais de notaire sont souvent critiqués pour leur impact sur l’accessibilité au logement. Dans un marché immobilier déjà tendu, ces frais peuvent constituer un obstacle financier majeur pour les acheteurs, en particulier les primo-accédants et les jeunes ménages. Cette situation renforce les inégalités sociales et territoriales en limitant l’accès à la propriété pour de nombreux citoyens.
Appel à une Réforme du Système
Certaines voix s’élèvent pour réclamer une réforme en profondeur du système des frais de notaire. Ces réformes pourraient inclure une meilleure régulation des tarifs, une plus grande transparence des pratiques tarifaires et une simplification des procédures pour réduire les coûts pour les consommateurs.
Conclusion : Vers une Plus Grande Équité
En conclusion, les frais de notaire sont souvent perçus comme une charge financière injuste pour les citoyens français. Le manque de transparence, les tarifs élevés et l’impact sur l’accessibilité au logement sont autant de raisons pour lesquelles une réforme du système est nécessaire afin de garantir une plus grande équité et un accès équitable à la propriété pour tous.